Sexuation

Le processus de sexuation consiste, pour l’être humain, à se placer d’un côté ou de l’autre de la différence des sexes — garçon ou fille — dans le domaine du signifiant.

Pour l’animal, les attributs biologiques commandent la sexuation, et l’instinct guide la sexualité. Survenant périodiquement et régulièrement, la sexualité des animaux se manifeste de façon impérieuse.

C’est sans doute dans une perspective à la fois analogique et déductive par rapport aux « mécanismes naturels d’une sorte d’instinct sexuel présumé universel » que Freud, observant la libido qui préoccupe constamment les êtres humains, a instauré la sexualité en tant que soubassement unique du psychisme, et a érigé « l’épanouissement de la maturité génitale » comme l’eldorado de la cure psychanalytique. Il s’ensuit que l’argumentation sexuelle, inlassablement répétée par Freud dans la plupart de ses explications, en arrive parfois, malgré le couvert du savoir médical, à friser l’obsession.

Mais la sexualité humaine n’est pas calquée sur la sexualité animale.

Acte sexuel

Pour l’être humain, la sexuation résulte de « l’acte sexuel » qui est un acte au sens de l’assignation au sujet des signifiants de l’homme ou bien des signifiants de la femme. Cette inscription est celle d’une valeur d’échange, alors qu’elle semble se fonder sur une valeur d’usage. L’acte se réalise dans la référence au langage : le sujet barré a la charge d’assumer les signifiants de la sexuation dans l’inter-signifiance de l’ordre symbolique, et la sexualité humaine se définit par le mandat accordé à ces signifiants dans les structures que sont le langage (l’inconscient), la parole (l’échange), et le discours (le lien social).

Bien entendu, la sexualité ne cesse pas de tourmenter les êtres humains pendant toute leur vie. Son influence se montre de façon différente suivant les quatre étages du graphe du désir, chaque niveau la gérant à sa propre manière. Schématiquement, on pourrait dire que la sexualité intervient dans la demande « en allant du besoin à la sublimation » — en prenant garde, ainsi que le précise Lacan à propos du graphe du désir, de se maintenir exclusivement sur le plan de l’inter-signifiance.

Cette présence permanente de la sexualité ne provient pas seulement d’une obéissance naturelle à des instincts animaux — d’ailleurs, dans ce cas, elle serait réveillée non pas par les pensées mais uniquement par les rythmes biologiques. Cela n’implique pas non plus que la sexualité soit la cause première des comportements et du psychisme. En réalité, dans un modèle basé sur le langage, la sexuation découle de connexions de signifiants guidées par les processus de l’inconscient, quelquefois sans tenir pleinement compte de la vérité biologique, et la sexualité qui en résulte est une conséquence — parmi d’autres, mais jouant malgré tout un rôle primordial et insistant — des mécanismes de l’inconscient : connotation, métonymie, et métaphore.

La sexualité humaine s’avère problématique, parce que le sujet barré se déplace dans l’inter-signifiance, en s’interrogeant sur l’objet petit a qui détient la vérité animale et sexuelle de son corps dans le réel.

Pour l’être humain, la sexuation résulte de « l’acte sexuel » qui est  l’assignation au sujet des signifiants de l’homme ou bien des signifiants de la femme.

Valeur d’échange de la sexuation

Références

Séminaire 3 : [page 191] Le sujet trouve sa place dans un appareil symbolique préformé qui instaure la loi dans la sexualité. Et cette loi ne permet plus au sujet de réaliser sa sexualité que sur le plan symbolique.

Séminaire 3 : [pages 201-202] Le symbolique donne une forme dans laquelle s’insère le sujet au niveau de son être. C’est à partir du signifiant que le sujet se reconnaît comme étant ceci ou cela […] à partir du moment où il est dans le symbolique, réalisé comme homme ou comme femme […]

Séminaire 14 : [séance du 24/05/1967] […] le sexe — le mien, le tien, le vôtre — repose sur la fonction d’un signifiant capable d’opérer dans cet acte [l’acte sexuel].

Séminaire 14 : [séance du 14/06/1967] Il n’y a pas d’acte sexuel, ai-je dit, pour autant que nous sommes incapables d’en articuler les affirmations résultantes. Ce qui ne veut pas dire, bien sûr, qu’il n’y ait pas quelques sujets qui y aient accédé, qui puissent dire légitiment : « Je suis un homme », « Je suis une femme ».

Petit discours aux psychiatres de Sainte-Anne : […] il s’agit de s’apercevoir que ce qui fait difficulté, c’est qu’on entre dans l’acte sexuel pour s’avérer tel ou tel, mâle ou femelle par exemple.

Séminaire 20 : [page 74] Telles sont les seules définitions possibles de la part dite homme ou bien femme pour ce qui se trouve être dans la position d’habiter le langage.

Séminaire 21 : [séance du 19/02/1974] […] il n’y a rien qui ressemble plus à un corps masculin qu’un corps féminin, si on sait regarder à un certain niveau, au niveau des tissus.

Séminaire 1 : [pages 140-141] Les éthologues démontrent […] [que l’] embrayage mécanique de l’instinct sexuel [chez l’animal] est donc essentiellement cristallisé sur un rapport d’images, sur un rapport […] imaginaire.

Séminaire 19 : [séance du 02/12/1971] […] la perversion chez les espèces animales. Au nom de quoi ? Que les espèces animales copulent, mais qu’est ce qui nous prouve que ce soit au nom d’une jouissance quelconque, perverse ou pas ?  

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