Substituts de l’objet petit a

L’objet petit a n’est pas spéculaire, mais ce n’est pas vraiment un inconvénient puisque l’on peut quand même l’évoquer à l’aide de signifiants substitutifs décrivant le signifié du corps, et provenant du corps structuré qui, lui, est spéculaire. Au cours de son enseignement, Lacan a mis en évidence quatre signifiants jouant ce rôle de substituts pour le jeune enfant : « le sein, les fèces, le regard, et la voix ».

Pour le sujet adulte, la panoplie des substituts de l’objet petit a ne se limite pas à ces quatre éléments « d’origine infantile » proposés par Lacan à titre d’exemple, mais s’applique à tous les signifiants — souvent porteurs d’une couleur érotique plus ou moins explicite — que chacun peut découvrir sur le corps structuré. À titre illustratif : les cheveux, la peau, les yeux, les lèvres, … mais aussi le souffle, l’expression du visage, les attitudes comportementales, les habits, etc.

Ils énoncent l’objet petit a lors de la formulation de la demande, en introduisant des références corporelles détentrices d’une tonalité sensuelle.

Pour désigner ces signifiants apportant des « valeurs d’échange », on utilise les termes « signifiants de l’objet petit a » ou « instances de l’objet petit a ». Bien sûr, l’objet petit a n’est pas un représentant et il n’a pas de représentants, mais ces expressions illustrent le fantasme de réunion du sujet barré qui serait de rendre l’objet petit a formulable.

Les substituts de l'objet petit a sont des signifiants substitutifs provenant du corps structuré, et apportant des valeurs d'échange.

Signifiants de la substance du sujet

Références

Séminaire 6 : [séance du 20/05/1959] […] leur forme qui leur permet de remplir cette fonction, de devenir les signifiants que le sujet tire de sa propre substance pour soutenir devant lui, précisément, ce trou, cette absence du signifiant […]

Séminaire 6 : [séance du 20/05/1959] […] si le terme d’être veut dire quelque chose, c’est le réel pour autant qu’il s’inscrit dans le symbolique […]

Séminaire 10 : [page 107] Ce sont des objets cotables, des objets d’échange.


Rôle signifiant des substituts

Les substituts de l’objet petit a ont en commun de résider à la frontière corporelle. En se situant dans la marge du corps, et en étant potentiellement sécables donc « amovibles » (Séminaire 6, séance du 07/01/1959), ces substituts suggèrent le fait que l’objet petit a peut se recouper à nouveau dans la répétition de l’acte d’instauration. Étant « détachables et pourtant entièrement reliés au corps », ils sont manipulables par la combinatoire signifiante des mécanismes du langage — déplacement métonymique ou substitution métaphorique —, et gagnent ainsi leur rôle de valeur d’échange en tant que signifiants à part entière dans la formulation de la demande.

Par exemple, la dualité des fonctions signifiantes apparaît clairement dans le cas des quatre substituts d’origine infantile cités par Lacan.

Le sein et les fèces prennent la place de l’objet petit a par déplacement métonymique (relation contenant-contenu). Ce sont les signifiants les plus simples que le bébé appréhende naturellement sur le corps. Pour l’enfant, ils sont représentatifs du corps propre.

Le regard et la voix prennent la place de l’objet petit a par substitution métaphorique (parallélisme conceptuel). Le regard est l’instrument du spectateur qui capte le réel sur l’image du corps d’un autre. Quant à la voix, Lacan insiste sur le fait qu’elle est entendue comme une loi porteuse d’un effet performatif, s’inscrivant dans les mécanismes langagiers de l’inconscient, et qu’elle réalise ainsi la fonction du « surmoi » de la psychanalyse. En effet, pour l’enfant, le regard et surtout la voix sont représentatifs de la présence de l’adulte.

Les substituts infantiles de l’objet petit a sont le sein, les fèces, le regard, et la voix.

Substituts infantiles de l’objet petit a

Références

Séminaire 14 : [séance du 16/11/1966] […] le sein, les scybales, le regard, la voix, ces pièces détachables et pourtant entièrement reliées au corps, voilà ce dont il s’agit dans l’objet petit a.

Séminaire 10 : [page 342] […] il ne saurait y avoir de conception analytique valable du surmoi qui oublie que […] c’est l’une des formes de l’objet petit a.

Séminaire 16 : [page 258] Il est strictement impossible de concevoir de qu’il en est de la fonction du surmoi si l’on ne comprend pas […] ce qu’il en est de la fonction de l’objet petit a réalisée par la voix, en tant que support de l’articulation signifiante […]

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